cuaderno

Il a gardé mon carnet. Un carnet que j'avais oublié. Un carnet tracé à l'encre des mers du sud. Papier brun strié. Taché de tous ces cris que j'ai poussés pour le rejoindre. Pour le garder lui - malgré lui, malgré la distance des continents, malgré le temps - en moi.

La souffrance du manque, de la rancune et du regret a cette terrible vertu de piéger la présence de ceux que j'aime dans mon espace intime. Maladie affective qui me ronge et m'épuise. Masochisme spirituel. Substance opiacée produite à même mon cœur et mon âme.

Et vingt ans après, alors que j'ai enfin réussi à l'oublier, lui, le carnet, les mers du sud. Alors que je me crois guérie, il lui suffit d'ouvrir un canal dans le cyberespace, de scanner trois pages du carnet [cuaderno], de me les envoyer là où je ne pouvais pas les attendre [elles viennent d'un temps où le cyberespace n'existait pas, où je n'avais pas encore appris à voyager entre les 3 Espaces, où j'ignorais tout de mon odyssée], pour que je sombre dans la plus terrible des agonies.

Nosotros, los de entonces, ya no somos los mismos.
Et pourtant.


Type de document : carnets personnels

Auteur fictif : Capitaine L

Auteur réel : Carole Lipsyc

Provenance du texte : Noyau liminaire

Référence : Pablo Neruda, Veinte poemas de amor, poème 20

Commentaires : aucun

Textes satellites : aucun

le roi est nu

Art version XIU : le discours prime sur l'œuvre.

Pendant que l'œuvre torture nos sens, assassine le Sens et brise notre intégrité, le discours s'installe comme seule légitimité artistique.

Désincarnation absolue qui substitue la construction intellectuelle au plaisir sensoriel.

Et pendant ce temps, le roi est nu.


Type de document : streetchroniques

Auteur fictif : Capitaine L

Auteur réel : Carole Lipsyc

Provenance du texte : Noyau liminaire

Commentaires : aucun

Textes satellites : aucun

.