station spatiale

J'ignore ce qui me pousse,
depuis des années,
à écrire ces textes,
à les relier,
inlassablement,
avec ténacité,
à les préparer
pour l'accrochage d'autres textes encore,
selon le modèle des premières stations spatiales en construction.

Quelle que soit la saison,
quelle que soit la réponse,
quelle que soit la réalité,
les épreuves,
le travail,
l'échec ou le succès,
je continue.

Opiniâtre, obstinée,
parfois obsédée.
De moins en moins.

L'objet m'échappera, c'est certain.
Il devient vivant.

Un texte vivant,
soumis aux lois de la maturation,
de la croissance,
de l'entropie,
de la dégénérescence.

Qu'en verrai-je ?
Qu'en saurai-je ?

Un désir : lui donner les structures nécessaires pour qu'il ne devienne pas un cancer ni un chaos.
L'aider à grandir et à s'autonomiser.


Type de document : carnets personnels

Auteur fictif : Capitaine L

Auteur réel : Carole Lipsyc

Provenance du texte : Printemps de la Démocratie

Commentaires : aucun

Textes satellites : aucun

chez élie

Prendre un café chez Élie, sur la terrasse, du mauvais côté de la place du Marché Saint-Honoré, cause circulation de voitures et vue sur le commissariat mais du bon côté cause exposition Nord-Est donc soleil le matin. Prendre un café chez Élie, tu trouveras pas moins cher dans le quartier, 5 F au comptoir, 9 F avec croissant, 20 F p’tit dej complet. Même pas le prix d’une eau chez Colette où pour pousser la porte déjà tu saignes. Prendre un café chez Élie parce que c’est chez lui. Les mégots plein par terre, les allumettes, les papiers de chocolat, le zinc en bois. Tour de manivelle, comme les bacs à bonbons des supermarchés, tu sais à l’entrée, après les caisses ou avant, ça dépend si tu mets ta pièce de 1 franc en entrant ou en sortant. (C’est dingue, c’est impérissable ce truc-là, ça traverse les générations ! Et sans changer ! La couleur, la matière, le design. Les bornes à bonbons seraient-elles les seuls vrais totems des hauts lieux sacrés de la consommation super/hyper/fun marchés ?). Un tintamarre de grains de café, océan mélangé – 14 crus différents – et des bocaux : des bocaux toscane, nuit d’été, amour absolu à Goa, des bocaux madeleines, des bocaux cacahuètes, et des paniers, des paniers brioches, pains aux raisins et mini-croissants, en sus quelques bises puissantes en plein sur le tympan. Élie ! j’ai promis que si le mercure montait à 28 ° celsius (pour avoir la correspondance en Farenheit utilise la formule suivante : tc = (tf - 32) : 1,8 ), je bronzerai sur la terrasse en bikini. En face du commissariat. On a le droit tu crois ? Élie dit que oui [ dikwi ]. Tiens, c’est drôle ça comme nom : Élie DIKWI. Prendre un café chez Élie DIKWI.


Type de document : streetchroniques

Auteur fictif : Capitaine L

Auteur réel : Carole Lipsyc

Provenance du texte : Noyau liminaire

Commentaires : aucun

Textes satellites : aucun

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