le XIU n'impose pas

Le XIU n'impose pas une dictature ni une théocratie ni un féodalisme. Il ne prône pas le mérite ni même le hasard. Il ne s'appuie pas sur la résignation et ne se justifie pas au nom de la raison. Il allègue simplement la défense des droits individuels et des intérêts privés. Et il les pousse jusqu'au bout. Pour le Bien Commun.

La liberté d'expression est totale : la censure n'existe pas. Officiellement.

Mais, comment s'exprimer quand toutes les idées et expressions sont soumises aux droits d'auteurs ? Quand, pour pouvoir aligner quelques métaphores courantes, il faut l'autorisation de l'organisme chargé de la défense du Patrimoine Sémantique? Quand toute publication doit s'acquitter de droits forfaitaires prohibitifs, accessibles à quelques grands consortium multinationaux toujours affiliés, par une ramification ou une autre, au XIU.

Quant à l'artisanat de l'information et de la culture - les indépendants et petites entreprises - ils sont eux aussi obligés de se regrouper dans des corporations pour arriver à payer les droits d'auteurs. Ces corporations n'ayant d'autre choix que de trouver des accords, elles aussi, avec le XIU. Avec tout ce que cela sous-entend d'allégeance et de compromission.

Aujourd'hui, ce mécanisme nous parait normal. Nous l'avons intégré. Nous sommes heureux d'avoir le droit d'utiliser le langage pour parler et penser sans devoir payer un impôt spécifique. Nous remercions les syndicats d'enseignants d'avoir su défendre - aux premières années du XIU - la gratuité des droits d'auteurs pour les écoles.

L'idée même d'une zone franche lexicale dans l'espace publique nous paraît utopique. Il nous est difficile d'imaginer ce temps où des ordinateurs ne parcouraient pas tous les discours et écrits, images et musiques, pour relever le nombre de séquences employées soumises au copyright.

Aujourd'hui, une étape supplémentaire doit être entreprise par les aspirants au voyage interspatial : l'affranchissement de la soumission au copyright.

Vous devez apprendre à utiliser les mots, les notes, les sons, les formes sans peur d'être dans l'illégalité et l'illégitimité. Vous devez retrouver votre liberté. C'est une question de pensée et de psyché. Un déconditionnement intense.

Ensuite viendra le voyage. Alors. Seulement.


Type de document : DJ's classes : le XIU

Auteur fictif : Capitaine L

Auteur réel : Carole Lipsyc

Provenance du texte : Noyau liminaire

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espace public

Station Picpus-Courteline. Je cours dans le métro. Je suis en retard.

Découvrant une énième campagne publicitaire, abattue, je laisse ma main attraper un carnet et me poser ces questions qui n’en peuvent plus de se taire…

La société crée-t-elle la publicité à son image ou bien se façonne-t-elle à l’image de la publicité ?

Quand 2 femmes en string, topless, sont engagées dans un combat de boxe - plus érotique que sportif - contre un homme en caleçon stretch ; quand 3 adolescents nus sur un canapé se reposent "avant" ou "après" la jouissance et que le sexe de la jeune fille est exposé ; quand un couple se déshabille pour copuler sur du bitume macabre près d’une cuvette de toilette étincelante en vantant la propreté du plaisir ; quand 2 femmes en attirail SM partagent lascivement un sofa : que nous dit-on ?

Que nous vivons dans une société libre sexuellement ou que toute résistance à l’orgie scatologique et pédophile est réactionnaire ?

Nous offre-t-on les images que nous voulons voir ou prépare-t-on de faux "libres consentements" et de vrais abus ?

Le sexe sert-il à vendre ou bien, en fin de compte, omniprésent, ne finit-il pas par devenir ce qui nous est vendu ?

Nos rues, nos bus, notre métro sont-ils désormais le terrain d’évangélisation d’une nouvelle idolâtrie dont l’icône et le culte seraient la sexualité orgiaque et violente bâtie sur l’esclavagisme du féminin ?

A l’heure où adolescents et jeunes adultes rencontrent la pornographie avant l’amour, est-il plus important de préserver l’espace public de la fumée de cigarette que des images sexuellement agressives et intrusives?

La permissivité absolue, le no limit, la fin des tabous ne finissent-ils pas par devenir une dictature ?

Notre passivité et notre silence sont-ils une impuissance, un renoncement, un accord ou de la complicité ?


Type de document : streetchroniques

Auteur fictif : Capitaine L

Auteur réel : Carole Lipsyc

Provenance du texte : Noyau liminaire

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