Les deux leurres du bréviaire
1. Comme un bottin, le bréviaire recense. Genre sec, apparemment froid et détaché, il entasse avec rigueur des informations anodines ou essentielles, des mots, des idées, des noms propres et communs, des dates, des sottises, tout.
Or, paradoxalement, l’effet produit par cette effusion de vocables exotiques, difficiles, inaccessibles, étranges, étrangers ou simplement exhaustifs, s’apparente à l’abandon langoureux et primitif éprouvé dans l’écoute de la musique ou de la poésie. La rationalité dépecée et systématique du bréviaire engendre un sentiment nourricier, un sommeil hypnotique et ronronnant, un entendement non intellectuel, une appréhension et une cognition sensorielles, hors du rationnel, et qui sont étrangères à la pensée articulée.
Le bréviaire, c’est le détournement baroque du langage classique, c’est le débordement réticulaire de l’écriture linéaire, c’est le champ du signe de la littérature ou plutôt son chant des baleines.
La différence entre le chant du cygne et le chant des baleines étant la qualité qui distingue les sirènes des saint-bernards, les premières ayant pour fonction de perdre le navigateur qui connaît sa route et les seconds ayant pour vocation de sauver le voyageur qui a perdu la sienne.
2. Comme un guide pratique, un dictionnaire ou un volume de référence, le bréviaire dresse un inventaire d’informations. Instructif et documentaire, il aborde un "objet" donné sous des angles divers et complémentaires.
Or, paradoxalement, les données rapportées au lieu de livrer cet objet le rendent de plus en plus mystérieux : d’anodin il devient insaisissable et secret, presque sacré. Finalement, le seul objet que nous semblons rencontrer et découvrir, le seul "objet" qui nous soit dévoilé est "l’auteur" : le bréviaire trahit ses limites et ses organisations, ses liens et ses associations, ses connaissances et ses lacunes, ses envies et ses peurs, ses accointances et ses sursauts, ses désirs et ses obsessions.
L’objet apparent du bréviaire n’est qu’un pré-texte à l’exploration et à l’exposition du système cohérent de signifiants à l’intérieur duquel se positionne son compilateur. Ainsi, la fonction véritable du bréviaire ne s’assimile en aucun cas à l’information mais au récit : celui de l’organisation cosmogonique du rédacteur dans ses choix d’inscription au sein du réel, de l’imaginaire et du langage ; celui de la rencontre fondamentale de l’altérité dans l’écart révélateur des dire et des taire.
Type de document : DJ's classes : récits variables
Auteur fictif : Capitaine L
Auteur réel : Carole Lipsyc
Provenance du texte : Noyau liminaire
Commentaires : aucun
Textes satellites : aucun
"Kiméria" est le second des 3 Espaces, l’espace des rêves et des contes. Il n’est pas soumis aux mêmes lois temporelles et physiques qu’Erel, le premier espace, l’espace de la vie quotidienne.
Les habitants de Kiméria sont des Kimériens, des chimères, ils sont faits de la matière même des rêves. Ils ne changent pas, ne vieillissent pas et obéissent à leur fonction. Parfois, ils accèdent à la conscience et au libre arbitre et deviennent comme Pinocchio, des êtres pleinement vivants.
La géographie de Kiméria est mouvante, elle obéit en partie aux mythes et aux rêves des êtres vivants (les Eréliens, les habitants d'Erel, ne sont pas les seuls être vivants).
Elle possède six continents : l’Europe, l’Amérique, l’Afrique, l’Asie, l’Océanie et Valinor (que certains appellent l'Atlantide).
Quelques lieux de Kiméria qui servent de cadre aux aventures du Récit des 3 Espaces : la Cour des Miracles, le Marché, la Toscana, le Fleuve Léthé et ses abords, la Rivière Sérendipité et ses abords, la Castalie, les Halles, le Bureau de l’Ordre.
Un détail : on dit en Kiméria comme on dit en Avignon.