un Enchanteur

Tu me demande où j'étais... Tu t'étonnes... Oserai-je te le confier...

J'ai plongé tête la première, comme une novice...

J'ai oublié toutes les règles de prudence, toutes mes expériences, tous mes principes.

...

J'ai rencontré un Enchanteur, un Hollandais Volant peut-être, un Mage. Et je l'ai suivi. Sans hésitation. Sans m'inquiéter, du Temps, du Vrai, du Juste, des illusions, de rien. Sans aucune question, sans aucune vision. Je l'ai suivi, c'est tout. Mon Sens.

...

Nous avons dansé, glissé, volé la Piste du Tango, de Piazza San Marco aux plages d'Argentine,
Nous nous sommes échoués sur la Baie des Anges, enlacés,
Il m'a bâti un château de glace sur les flancs de l'Himalaya, il y faisait doux, il y faisait chaud,
Il a réinventé Syracuse, ses pierres, ses airs, mille orchestres,
Il a fermé des volets verts et nous nous sommes réveillés à Shanghai, Shanghai !, enivrés comme par l'opium,
Il a invité la pluie, son odeur, sa terre, elle nous a captivés, elle nous a embrassés, elle nous a emportés et ce fut la forêt. Noire. Propice. Envoûtante. Excentrique,
Il a serti mes jours de musique — baroque, latine, kitsch—, de sa musique aussi ...

Je n'ai pas hésité, j'étais émerveillée ... je me laissais guider comme si je n'avais jamais voyagé... je n'ai rien demandé non plus... rien sauf le Tango.


à Arte Miss


Type de document : correspondances

Auteur fictif : Capitaine L

Auteur réel : Carole Lipsyc

Provenance du texte : CL

Référence : "Orchidea" de J.B.

Commentaires : aucun

Textes satellites : aucun

sortants

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à nouveau

( Loula dit : )

A nouveau, je me réveille et je veux réapprendre à vivre. Combien de rêves supporterai-je encore ? Combien de rencontres ? A la fin, finirai-je si décharnée que la lumière pourra me transpercer ? Je l’avais guetté dans les rues, dans les moissons de connivences, dans les pas de ceux que je suivais (à moins que ce ne fussent eux qui me suivaient), je l’avais guetté dans mes troubles, doutes et cauchemars. Pour le retrouver et le perdre encore.

Peut-être dois-je m’attacher à un homme de chair et d’écrits, d’horaires et de béton, d’auto et de métal.

Peut-être dois-je abandonner l’espoir de le revoir et de le garder. Peut-on garder un mirage, une vapeur bleue, un songe d’été ?

Je sais pourtant qu’il faut le rejoindre et retenir au flou de ses yeux ce vertige sans retour et mon sourire trop doux.

Il m’a donné un peu plus d’amour qu’il ne faut
pour mourir et trop peu pour continuer à vivre.


Type de document : chants des griots

Auteur fictif : Loula-Ludivine

Auteur réel : Carole Lipsyc

Provenance du texte : Noyau liminaire

Référence : Sainte-Croix-Loyseau. "Blues". Dépêches au cerf-volant.

Commentaires : aucun

Textes satellites : aucun

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