Aujourd'hui, enfin, j'ai eu une vision du Scribe. De son livre. Je ne l'ai pas encore localisé. Peut-il l'être d'ailleurs ?
Est-ce une question de localisation et d'espace ?
Mais je l'ai vu.
Et dans son livre, naissait tous les récits. Dans un langage qui rassemblait toutes les langues connues et inconnues. Car il est des langues qui n'ont pas trouvé le chemin des voix humaines. En ce monde-ci.
Type de document : journaux de bord
Auteur fictif : Capitaine L
Auteur réel : Carole Lipsyc
Provenance du texte : Noyau liminaire
Commentaires : aucun
Textes satellites : aucun
Ce jour-là, je voulais juste me promener mais on ne pénètre pas dans la forêt australe comme on le ferait dans nos bois paysagés.
On s'arrête.
On pense aux reptiles, aux arachnides, aux insectes et à leurs morsures létales.
Comment ne pas s'arrêter ? Je voulais m'assurer d'être accueillie et préservée.
Et la forêt m'a parlé. Elle m'a répondue. Elle m'a apaisée. Elle m'a guidée.
Je me sentais si démunie : je n'avais pas emporté mon armure d'encre et de papier, cet intermédiaire qui filtre mon vécu. Je ne pouvais pas figer l'expérience, l'arrêter, la vider de sa puissance, pour l'épingler, comme un papillon, dans le cadre de mes écrits. Je devais entendre dans ma peau, dans mes os, l'invitation de la Terre.
J'avais vingt ans.
Certains passent leur vingt ans dans la trépidation des boîtes à rythmes, d'autres cueillent des champignons bleus ou construisent quelques fondations bien solides, moi je suis simplement entrée dans cette forêt.
Je n'ai pas tout su du voyage. Pas immédiatement. Mais j'ai entrevu un possible.
Je dois te le dire : tu viens de là. De cette conversation originelle. De cette orée-là.
à sa fille
Type de document : correspondances
Auteur fictif : Capitaine L
Auteur réel : Carole Lipsyc
Provenance du texte : CL
Commentaires : aucun
Textes satellites : aucun